La terre, cette couleurJean-Gabriel Cosculluela
A Françoise Slacik
Il n’y eut pas de motPlus haut que l’autreIl n’y eut pas de gestePlus haut que l’autreIl n’y eut longtempsQue ce mot oubliéIl n’y eut longtempsQue ce geste oubliéCreusant le silenceSans ignorer l’abruptL’air déserté maintenant Il n’y a que ce motIl n’y a que ce gesteCreuser fouirC’est tout commeCet animal portantLe silenceLe silence est un lieuHors de tout lieuBleu dans l’obscurEt terre de sienne démembrée Ici en deuxLa moitié du motLa moitié du gesteLa douleurLa nuit voirL’écriture grifféeDe la couleurPrendre la lumièreIci la nuit voirLaisses de terreOù la mort bouge encoreLa bouche le corps LaisserLa terre cette couleur Que reste-t-ilDans la penteDe cette couleur ? D’elle le nom de terreGravée cette douleur Ce trou cet attraitDe lumière d’obscurEchappée de la lumièreComment n’êtreDe cette douleurComment n’êtreDe cette couleurTrop nue, inconnueDe la mort Qu’est-ce qu’il y aAvant le nom ?Dit l’enfant Jamais silenceN’en reste à l’air vifDe la pente du mot portéEn terreTraversé Viens dans le motHaute lampeCouleur douleurAffouilléeNe rien savoir encoreOù commence le nom Viens à manquerCela ne passe jamaisLe temps semble affouilléDe tout commencementManquerManquer de toutÔter même le mot manqueDu peu de motsQui restentÊtre même le mot manqueDu peu de motsQui restent Ta tombe dans l’airLe mot manque dans le cielLa terre de cielLa voûte inachevée de bleu Edifie une tombe dans l’airDe cette couleurRecueille les bruits de boucheDe la tombePresque rien pour mémoireLa terre est la lumière de l’ombreQu’elle est L’ombre est le nom très basLe silence encoreDe la lumièreIl n’y a que ton nom qui commenceLa gorge serréeLaisse de terreTon nom commence toujoursLa mort se tient très basDans la lumière La terre cette couleurNote d’inconnaissance Ce chant terribleTerre de bleu perdreNe s’écarte pas des fleursCe chant terribleTerre de bleu perdreNe s’écoute pas des fleursCe qui reste de la trameD’enfanceNous penchés qu’accompagneLe bleu arraché de l’airLa pente des fleursDans les coulures du tableau
Villevocance, 1996-1997
Notes:- Les mots en caractères gras sont d’André Du Bouchet, Bernard Noël, Anne Slacik, Joë Bousquet.- Des extraits de ce livre ont été publiés dans le catalogue de deux expositions d’Anne Slacik à la Galerie Jacob (Paris) et à la Galerie Edouard Manet (Gennevilliers) à l’automne 1997. Une lecture publique de ces textes par l’auteur a été faite le 4 octobre 1997 à la Galerie Jacob.
En outre, ces textes ont donné lieu à un livre singulier, manuscrit par l’auteur, peint par Anne Slacik, en 16 exemplaires, en 1996-1997.
Les éditions Atelier du Hanneton ont édité ces textes en 2002, accompagnés d’une gravure originale d’Anne Slacik.