D'où la lumière
Jean Gabriel Cosculuella
pour Anne Slacik
L’espace du tableau à la recherche de sa couleur, de sa lumière. Trois phénomènes en un seul…
Couleur qui n’est déjà plus une couleur, plutôt un des foyers remuant de l’espace…
Mémoire et désir brûlés d’un coup par un tableau, s’il y a lieu.
Jean-Louis Bentajou, Les couleurs
La lumière, avec les couleurs, apparaît et disparaît du tableau. La lumière ne s’éteint pas vraiment, elle ne fait que s’absenter pour prendre mêmement les matières et les formes des terres et des ciels, du visible. Voyons-nous maintenant « le visible comme peinture » ¹ ?
Dans le regard, la lumière suscite, abruptement ou légèrement, les limites des couleurs, elles les efface, les dépasse.
Les couleurs reviennent ou ne reviennent pas de leur transparence. Comme la lumière, elles s’appuient, seules, sur le secret de peindre, prêtes à tomber dans le dehors ou le dedans.
Il reste toujours un paysage à cette lumière et ces couleurs, parfois autour d’un arbre seul ou de la seule poussée d’un trait surgi nous ne savons d’où - pour reprendre l’espace infime, puis infini de la peinture. Les couleurs y débordent, disséminées dans le silence du regard. Pour poursuivre.
Comme la lumière, les couleurs ne séparent pas du monde : elles en disent, hors les mots, les manques, les risques.
Les couleurs et la lumière sont surface et surtout profondeur : elles vibrent dans l’ordre incertain des choses. Le regard est au cœur, tentant de capter une énergie nomade, des lignes de fuite, des rythmes.
Le peintre n’atteint pas, n’éteint pas la lumière et les couleurs aux limites de peindre. Le peintre ne les nomme pas, il les cherche dans les limites.
Il y a une pensée de la peinture dans les matières, les formes mêmes de la lumière et des couleurs, lorsqu’elles se perdent sciemment ou aveuglément dans l’espace du tableau.
Allons-nous faire la lumière sur la peinture ? Le visible comme peinture ? Les couleurs remuent. D’où, la lumière.
Jean Gabriel Cosculluela
9 – 11 décembre 2008
¹ Bentajou (Jean-Louis) – Les Couleurs – Toulouse : Ombres blanches, 1999